mardi 15 juillet 2008

16. Kirikou est à Rabat

0. Cinéma d’animation à Rabat :

Le Festival International du Cinéma d’Auteur de Rabat, qui s’est déroulé du 21 au 30 juillet, est une manifestation qui a pour objectif non seulement de créer un espace de rencontre et d’échange entre les différentes nations et les différents genres cinématographiques, mais également de contribuer à la diffusion des films de qualité, comme « Le Cahier » de Hana MAKHMALBAF, « Le Bonheur d’Emma » de Sven TADDICKEN, « l’Homme qui marche » de Aurélai GEORGES, « Armin » de Ognjen SIVILIC, « Pièces détachées » d’ Aaron FENANDEZ, « Tricks » d’Andrzej JAKIMOWSKI… C’est dire qu’il y a de quoi faire plaisir aux cinéphiles, en ce que le programme était si varié qu’il répondait à tous les goûts : compétition officielle (12 films), hors compétition (avant-premières), découvertes (cinéma original), cinéma du monde (films rares), documentaire, cinéma maghrébin, hommages (Latif LAHLOU, Badia RAYANE, Nadia LJOUNDI), séances pédagogiques, leçon de cinéma (Nabil El MALEH), ateliers (scénario, montage), débats et la section enfant.

C’est dans ce cadre que le jeune public rbati a eu la chance de faire connaissance de Michel Ocelot et, sur le grand écran du Septième art, de sa trilogie filmographique de longs métrages, à savoir « Kirikou et la Sorcière » (1998), « Kirikou et les bêtes sauvages » (en corrélation avec Bénédicte Galup, 2005) et « Azur et Asmar » (2006). Le but des organisateurs était, sans doute, de « sensibiliser enfants et adolescents aux problèmes concrets de la société tout en conservant la part magique propre au septième art ».



1. Michel Ocelot :
Né en 1943 à Ville-franche-sur –Mer, sur la côte d’Azur, il a vécu son enfance en Afrique (La Guinée) avant de s’installer à Paris. Après des études des Beaux arts, il s’exerce au cinéma d’animation dans lequel il va s’illustrer.



2. Kirikou et la Sorcière : un conte en image :

« Kirikou n'est pas grand, mais il est vaillant »

Il y a lieu de rappeler que le premier film est tiré d’un conte que le réalisateur a déformé pour des raisons esthétiques et didactiques. Comme le texte d’origine, ce film reproduit, en réalité, la structure du récit classique. En effet, Kirikou est un sujet exceptionnel, dans la mesure où sa naissance s’inscrit sous le signe de l’autonomie : c’est un noir de très petite taille, qui s’enfante tout seul et rompt de ses propres mains le cordon ombilical. A cet enfantement singulier, il faut ajouter l’idée que Kirikou jouit d’un pouvoir extraordinaire du fait qu’il prend la parole au sein même du ventre de sa mère. Son destin semble être déjà tracé, lorsqu’il apprend par sa mère que l’absence des hommes de sa tribu est due à l’existence d’une sorcière anthropophage : Karaba. Et Kirikou s’ingénie à combattre cette femme superbe et cruelle, qui a fait assécher la source. Il lui faut donc triompher du Mal en faisant face à une suite d’obstacles dont les enfants de la tribu, son oncle, les fétiches redoutables, le monstre, les bêtes, le serpent…etc. Cela permet de mettre en exergue les qualités du petit héros (bravoure, audace…) et des forces auxiliaires (mère, grand-père (sagesse)).




Pour délivrer son village de l’emprise maléfique, Kirikou recourt donc à ce qui constitue les origines même de sa tribu : le grand-père. Celui-ci va lui a révéler les secrets des choses. Ainsi, cela permet à Kirikou de vaincre la sorcière en lui volant son trésor d’or et en lui enlevant l’épine que les hommes lui ont introduite dans la colonne vertébrale.



3. Kirikou et la Sorcière : une leçon d’amour et de pardon

Sur le plan symbolique, le voyage que Kirikou va entamer, de sa mère à son grand-père en passant sous le sol, représente un passage initiatique, dans la mesure où il permet au héros de réaliser deux choses complémentaires et cohérentes : passer de l’enfance à la maturité (petit/grand) et de dévoiler le secret de Karaba. En effet, cette femme, contrairement à ce que soutiennent les villageois, est victime d’un viol perpétré par les hommes du village, comme en témoigne ce symbole phallique (l’épine). En introduisant le baiser magique et le mariage de Kirikou et Karaba, dans la trame narrative, Michel Ocelot va plus loin que l’auteur du conte, car il met en scène le pouvoir de l’amour et celui du pardon. Ces deux notions vont être développées davantage dans « Azur et Asmar », où les deux personnages, malgré leur différence de couleur (Azur/Asmar) et de langue (français et arabe) découvrent qu’ils ne sont en fait qu’un.

Par ailleurs, la sexualité et la politique entretiennent des rapports tellement ambigus que Karaba serait cette Afrique qui souffre des traumatismes et qui attend « un petit, mais qui peut beaucoup ». Partant, la délivrance de cette Afrique, qui endure les calvaires, ne vient ni du FMI ni de la Banque Mondiale que dénonce le film de « Bamako » de Abderrhmane SISSAKO, mais du citoyen africain, si minuscule soit-il, qui est appelé constamment à faire preuve de courage et de lucidité afin de mettre fin à toutes les superstitions, et à combattre la peur, qui en est l’origine principale.

4. Pour conclure :
Et dans un processus de contagion, l’enfant-spectateur apprend, autant que le héros du film, que le Mal est une question relative, qu’il n’est, trop souvent, que cet iceberg dont on ignore la plus grande partie, mais surtout qu’il faut le déraciner, pour que naisse un monde d’amour,de paix et de bonheur.





Bouchta FARQZAID

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